1773 - Intervention sur une maladie épizootique sur les bêtes à cornes à Nueil et Thilouze, Election de Chinon

Photos du document original (6 pages)

Rapport d'intervention manuscrit de Douté de 7 pages.

Transcription (orthographe originale respectée)
 

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Maladie epizootique qui a régné sur les bêtes à cornes de la paroisse de Nueil, Election de Chinon, 1773

Noms de 25 propriétaires pour chacun desquels les statistiques suivantes ont été enregistrées:


(1) Nombre des boeufs et vaches
(2) Nombre de ceux morts avant mon arrivée
(3) Guéris
(4) Préservés

Puis cumul de ces chiffres en bas de colonne
(1) 87
(2) 9
(3) 21
(4) 54


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Maladie epizootique qui a régné sur les bêtes à cornes de la paroisse de Thilouze, Election de Tours 1773

Noms de 24 propriétaires pour chacun desquels les statistiques suivantes ont été enregistrées:
(1) Nombre des boeufs et vaches
(2) Nombre de ceux morts avant mon arrivée
(3) Guéris
(4) Préservés

(1) 129
(2) 9
(3) 31
(4) 89


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Maladie epizootique qui a régné sur les bêtes à cornes de la paroisse de Nueil et Thilouze a été un véritable Entrax ou charbon a en juger par les Symptome Suivants


1° Les animaux malades refusoient toute espèce d'aliment soit solide, soit liquide.
2° Une chaleur très considérable dans l'intérieur de la bouche.
3° Les yeux très abbatus, la membrane conjonctive fortement enflâmée
4° Le poulx fort élevé et bien plus vite que dans l'état de santée
5° La rumination entièrement suspendue.
6° Les excrétions se faisoient avec autant de facilité que dans l'animal sain.
7° Peu de temps après que les animaux étoient attaqués de la maladie, un bubon se manifestoit sur un des jarets qui augmentoit en peu de tems à l'équivalen (?) la grosseur d'un bon oeuf de poulle, qui était circonscrit par un cercle extremement noirâtre. Le mal augmentoit et remontoit par gradation insensible et propoageoit jusque sur le dos. Là il produisoit un empliment qui s'etendoit tout le long de l'epine dorsale et lombaire; en passant la main sur cette partir on entendoit un bruit semblalble à un parchemin que l'on broÿe.
Le mal se soûtenait dans cet état l'espace de 4 à 5 heures, l'emphyseme diminué se formoit une ...de l'extérieur à l'intérieur. les animaux périssoient dans moins de 12 à 15heures; si l'on n'apportoit des secours promts et actifs relativement à la maladie.
Lors de mon arrivée, j'en trouvai deux qui venoient d'expirer, étoient encore tout fumants; je presiday (sic) sur le champ à l'ouverture.


1° Tous les vaisseaux capilaires de la surface interne des ligaments du tissus cellulaire et des muscles parurent...

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...gorgés d'un sang extrèmement noir et épais.


2° Dans la poitrine les bronches et les véssicules pulmonaires étoient inondées d'un humeur écumeux, sanguinolente. La surface extérieur des poumons étoit parsemées çà et là de taches livides et noiratres qui annoncoient une gangrène prochaine, la substance intérieure remplie d'un sang noir et épaix, une inflammation générale dans tous les viscères de cette capacité.


3° même inflammation s'est fait appercevoir dans la cavité.


4°j'encisai le bubon qui était aux jarêts, l'intérieur m'en parut totalement sphacelé.


Je les fis enfouir de sept pieds de profondeur ainsy que quelques portions d'autres mortes plusieurs jours au paravant mon arrivée, qui étaient encore sur la surface de la terre.


Mes premiers soins furent de faire séparer les animaux sains d'avec ceux en qui on reconnut la maladie existante.


Je fis nettoyer les étables de leurs fumiers et furent parfumés deux fois le jour pendant tout le cours de la maladie avec les plantes aromatiques, afin de renouveler l'air des étables, et d'éloigner par ce moyen les miasmes putrides qui étaient répandues dans l'atmopshère.


Je donnai aux animaux malades matin et soir un bol composé, savoir,
Camphre troi gros
Quinquina
Sel ammoniac , de chacun deux gros
A midy un breuvage composé de ce qui suit
Racine de guimauve
Graine de lin, de chacun une pincée
bouillis dans trois pintes d'eau commune jusqu'à réduction d'un tiers, j'ajoûtay à la colature une once de sel de nitre.
Des lavements émollients au nombre de deux matin et soir.
Ce traitement étoit suivi l'espace de 5 à 6 jours ou la maladie communement cédait à l'efficacité des remèdes.


Le 7 ou 8è jour je passois aux purgatifs qui fut pour chaque animal savoir
Aloês
Crême de tartre
Sel de nitre,
de chacun une once, je formois du tout avec le miel un bol.
Suivis immédiatement d'une infusion d'une once et demie de feuilles de sené dans une pinte d'eau.


Le lendemain de l'administration de la médecine les animaux purgeoient avec facilité, et aucun ne s'en est trouvé fatigué, l'effet en étant cessé les animaux ou recouvroient insensiblement l'appêtit, la rumination s'exécutoit et c'est ce qui nous annonçoit authentiquement le recouvrement de leur santé.


Préservatif: on fit indistinctement à tous les animaux non attaqués de la maladie une saignée à la jugulaire, le lendemain matin on leur donnait intérieurement:
camphre
sel ammoniac
de chacun deux gros dissous dans un verre d'eau de vie
Leur boisson ordinaire fut pendant 8 jours consécutifs de l'eau blanchie par le son de froment nitré et légèrement acidulé par le vinaigre de vin.
Extérieurement, je commençai par inciser la tumeur qui existoit à l'un des jarets par une incision cruciale, j'appliquois immédiatement après les vessicatoires que j'avois soin de faire fortement pénétrer avec une pelle rouge que je faisais tenir à une légère distance du tégument à fin de dilater les pores et faire pénétrer avec plus de facilité les médicaments.


Dans d'autres je me suis seulement contenté après avoi incisé la tumeur, d'en fortement cautériser le fond et toute l'étendue de l'endroit ouvert avec un fer rouge afin d'exercer une vive chaleur dans la partie, borner les progrès de la gangrène, et produire une abondante et loüable supuration, qui en effet fut fort abondante. J'eus tous les succès possibles de l'entretenir par les medicaments supuratifs.
Lorsque la plaÿe eut suffisamment supurés et que les ... furent suffisamment dégorgés, je passay aux dessicatifs qui terminèrent les cures.


Aucun n'a succombé entre mes mains, ils ont été parfaitement rétablis et rendus aux cultivateurs.


L'été de 1773 a été fort chaud, les endroits où les animaux sont obligés de s'abbreuver n'étant uniquement que des marnes qui ne contiennent que l'eau du ciel et que ces mêmes marnes se sont trouvées épuisées de tout principe d'eau par la trop grande sécheresse: les animaux nont pas eu une sufisante quantité de liquide pour se désaltérer vü que les sources dont très rares dans ce paÿs.


C'est à Monsieur Allain Curé de Nueil à qui les habitants sont redevables du bonheur d'avoir porté ... secours promts et actifs à la maladie qui existait sur leurs animaux; c'est lui précisément qui en a donné les premiers éveilles à Monsieur Genty pour l'absence de Monseigneur l'Intendant; je fus député sur le champ pour en faire la visite et en même tems pour la traiter. ce même Monsieur Allain n'a cessé pendant tout le cours de la maladie de m'accompagner dans toutes les fermes et métairies de la la paroisse où il y avait des animaux attaqués de la maladie, sans lui beaucoup auroient péri faute de promt secours.